Vaudou: Collection J.J.Mandel |
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Collection
Jean-Jacques Mandel
Jean-Jacques Mandel est anthropologue
de formation.
Il a collaboré comme photographe
et grand reporter au groupe Marie-Claire tout en menant des études
sociologiques en Afrique.
Il fut rédacteur au service
culture de "Libération" avant d'y prendre la direction du service
société-mode de vie.
Son parcours l'a conduit ensuite
à assurer diverses responsabilités dans le monde de la presse,
comme Chef de l'éditorial chez Magnum, ou rédacteur en chef
de Contact Press Images.
Il s'intéresse aux mouvements
noirs aux Etats-Unis et oriente une partie de son travail vers les courants
afro-centristes nés de diasporas.
GEO a publié ses reportages
sur le Mali, les Etats-Unis, et en Octobre 2000, son enquête sur
les descendants d'esclaves en Colombie.
Sa collection était le fruit de
plus de vingt ans de voyages et de découvertes.
Elle a été dispersée par nos soins avec Maître Cornette de Saint Cyr le 20 décembre 2000 |
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Voyage en Voodooland
Le vaudou est un pays qui se joue
des frontières. Un génial bricolage culturel. Il a été,
et restera, comme l'inaltérable et définitive réponse
« naturelle » de la culture du Sud à la tentation du
Village Global. Une parade spirituelle à la mondialisation commercialo-civilisatrice
imposée de force, depuis cinq siècles par le Nord esclavagiste.
C'est le refus de disneylandisation du monde. Le vaudou est moderne, mieux
il est high-tech : c'est Internet avant l'heure. De panthéon personnel
à panthéon personnel, il communique en tissant un patchwork
relationnel entre les continents. Une grande Toile qui relie Cotonou (Bénin)
à Salvador de Bahia (Brésil), Accra (Ghana) à Buenaventura
(Colombie), Luanda (Angola) à Port au Prince (Haiti), Lagos
(Nigeria) à Régla (Cuba) `
Le vaudou est un Etat magico-religieux,
dirigé par une bureaucratie céleste. Un Etat idéal,
sorte de démocratie présocratique, dans lequel si on doit
les craindre, les dieux n'en restent pas moins au service des vivants.
Les fétiches sont l'expression
de ces divinités, la matérialisation de leurs corps. Des
corps à l'image de celui des hommes. C'est pourquoi quand les dieux
ont faim il faut les nourrir, de lampées de gin ou de schnaps ;
quand ils sont en colère, il est urgent de les calmer par des ordalies
! Le vaudou est une langue qui exprime crûment le quotidien, un peu
comme la carte de visite d'un marabout exilé dans une mégalopole
européenne : retour d'affection, troubles sexuels, chance au jeu,
réussite aux examens, protections des voleurs.
La géographie du vaudou est
celle de líintime et son territoire celui des relations humaines.
Des hommes entre eux, certes, mais surtout de leur rapport avec le Cosmos.
Les fétiches sont gardés par des « vieux papas »,
dans líombre des bois sacrés. Des prêtres, état-major
de la police des frontières entre le Visible et líInvisible.
Des passeurs qui font le va-et-vient entre le monde des vivants et celui
des morts. Voyager en terre vaudoue ? Cíest entamer, à líaveuglette,
un long périple en zig-zags sur les traces de Gulliver, accepter
le retour en enfance, dans les pas díune Alice noire. Un grand plongeon
au plus profond de notre inconscient. A líorigine des rêves
et des mythes. Un rendez-vous au Pays des Merveilles.
Le vaudou est une mémoire qui
nía rien gommé du trauma originel qui fonde toujours líAfrique
moderne : la « Shoa » de la traite des esclaves. Mémoire
juive, mémoire nègre ! Et si le navire négrier est
souvent présent, revisité dans la navette du tisserand, cíest
que la tradition orale continue à tisser inlassablement les fils
de la parole de ce douloureux souvenir. Plus jamais ca ! Si par mégarde
líincrédule venait à líoublier, la multitude
de chaînes et de cadenas, couverts du sang des libations de victimes
expiatoires, aura vite fait de rappeler à líordre líincrédule.
Le vaudou est líinventeur du
« ready-made ». Ce sont ses esprits qui ont chevauché
Duchamp et Picasso. Ces même « loas » qui ont guidé
la main díHector Hyppolite, le peintre-paysan illuminé célébré
par André Breton et celles de Georges Liautaud, le Calder haïtien.
Le ready-made vaudou níest pas un art modeste, cíest líexpression
artistique des racines minimales, líempreinte de ce qui reste quand
on a tout oublié. En devenant une culture marrane le vaudou,
qui síest caché là où on ne líattends
pas, ressort lorsquíon ne síy attend plus. Souvent autour
díun autel ou díune table. Pour un festin avec les dieux.
Le livre des fétiches renfermant les dernières recettes de
cuisine magique.
Jean-Jacques Mandel |
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L'expression la plus intense
et parfois aussi la plus complexe de la sculpture des possédés
appartient à un art presqu'inconnu
(on le connaîtra) celui des sculpteurs vodun du Dahomey...
En face d'elle, l'irrationnel
des autres arts devient logique.
André Malraux, "L'Intemporel",
Gallimard 1976.
La collection Jean-Jacques Mandel
présente entre autres un trés important ensemble de fétiches
liés aux cultes Vaudou des peuples Fon, Yoruba, Nago, Ewe, du Togo,
du Bénin, et du Nigeria.
Lorsqu'ils ne sont pas trop recouverts
de matières sacrificielles ou ne disparaissent pas sous les charges
diverses, il est possible de distinguer les styles de sculpture propres
à chaque ethnie, les faces plates bien coiffées des ewe,
les visages caractéristiques de Yoruba, les traits fins et réguliers
des Nago, et les visages Fon pouvant se regrouper en quelques écoles
caractéristiques.
La majorité n'étant
malheureusement pas attribuable à une ethnie précise avec
certitude, les fétiches seront décrits sans mention de provenance.
Sauf indication contraire, ils sont en bois. |
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" Les grands fétiches Vodu
n'entrent en scène que chez les morts. leur art arbitraire entre
tous, conjuguant les formes taillées de la sculpture avec les formes
brutes des ossements, des morceaux de crânes, entreprend de leur
donner une vie d'organisme, d'espèce inconnue - et y réussit"
André Malraux
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Rare ensemble d'objets Vaudou
Haïtiens
Pour une meilleure compréhension
du développement du vaudou en Haiti, et plus d'informations sur
les artistes ayant réalisé certaines de ces oeuvres, cf:
"Sacred Arts of the Haitian Vodou" Donald J. Consentino editor UCLA
Fowler Museum of Cultural History 1995, catalogue de l exposition
ayant circulé à travers les Etats Unis. |
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L'Art du fer de Georges Liautaud
(1899-1991)
Forgeron, maçon et fabricant
de croix de cimetières, Georges Liautaud est à l origine
du développement de l art du métal découpé
provenant des Dwum (bidons recyclés). Le panthéon
vodou ainsi développé est probablement une résurgence
de l art du fer des Fon de l ancien Dahomey dont une
des plus grande réussite est sans nul doute le grand dieu Gu collecté
par Fonsagrives à la chute du royaume de Behanzin, aujourd hui
conservé au Musée de l Homme.
Liautaud est aujourd'hui mondialement
reconnu comme un artiste majeur de l'art vaudou haïtien, la
qualité de sa production lui a valu le surnom de "Calder
haïtien". Ses oeuvres sont d'une grande rareté
sur le marché. Elles ont été exposées
entre autre au Musée de Brooklyn en 1978.
Sa première oeuvre aurait été
une sirène, et demeurera son thème favori sous le le titre
de " lasiren " |
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Les "Flags"
Un autre développement de
l'art vodou en haiti est caractérisé par les "drapeaux",
qui évoquent encore fortement les grandes tentures en appliqué
de líancien royaume du Dahomey.
Ils sont exécutés en
tissu recouvert de perles colorées et de petites pièces de
couleur plates et percées, portant le nom de sequins. |
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Pierrot Barra
Après avoir assisté
durant 30 ans sa mère qui était prêtresse vodou, Pierrot
barra commence à faire des drapeaux avant de développer des
représentations d'esprits vodou faites à partir de
matériaux recyclés, poupées, jouets, sequins, verre,
morceaux de machines.... Il est assisté de sa femme Marie-casaise,
et tous deux sont prêtres vodou. |
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Textes & Images : (c) marie-catherine daffos & jean-luc estournel /aaoarts.com 1997 / 2018 |
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