Jatâmukuta
Lokeçvara
Cuivre
doré et argent. h. 19 cm
Tibet-Occidental-Népal.
ca 1300-1320
Superbe représentation en argent d'un aspect rare
d'Avalokiteçvara debout, à quatre bras, l'un
tenant le vase, l'autre le lotus, le troisième faisant le geste
de don, et le dernier ayant du maintenir un rosaire. Son chignon complexe
se termine par une image diminutive d'Amitabha.Costume et parures
ont été rehaussés par une dorure. Elle est fixée
à un socle lotiforme et à un prabhamandala, en cuivre
doré rehaussés de pigments rouges. A ses pieds, de part et
díautre du socle, deux couples d'attendants l'accompagnent.
Noter:
De
par son matériau (argent) et son style franchement dérivé
d'un archétype Pâla associé à des éléments
purement néwars, cette sculpture síintègre parfaitement
dans le petit corpus d'images religieuses pouvant être liés
aux souverains Khasa-Malla qui en dépit d'origines obscures
laissèrent une trace méconnue mais très importante dans
l'histoire, en régnant sur une large part de l'Himalaya-Occidental
(Inde, Tibet, Népal) de 1150 à 1350 environ.
Un des éléments stylistiques les plus troublants
et marquants à la fois des oeuvres attribuables à cette dynastie
est cette symbiose d'éléments népalais
associés à des traits typiquement inspirés de l'art
Pâla quasiment inconnus au Népal. Ici par exemple, l'iconographie
de Jatâmukuta Lokeçvara, répandue dans l'Inde
du Nord-Est des 10° et 11° siècles comme en témoignent
des bronzes découverts à Kurkihâr (Bihar/Inde), mais
très rarement présente dans les contrées himalayennes.
Lors de son exploration des sanctuaires de la région dans les années
1940, G. Tucci y avait noté dans les temples la présence de
nombreux bronzes et de stèles en pierre d'origine indienne
et d'époque Pâla.
Peut-être les souverains de cette lignée aux origines
mal définies ont ils ainsi cherchés à se créer
des origines, ou ont ils tout simplement du fait de la renommée et
de l'apparente richesse de leur royaume, accueillis des religieux
et artistes réfugiés des universités bouddhiques du
Bengale et du Bihar dévastées par les troupes musulmanes, désireux
de se mettre sous la protection d'une des dernières monarchies
bouddhiques de l'Inde.
Cette esthétique particulière doit être considérée
comme un style tibétain majeur à part entière, qui par
le biais des riches donations faites par les monarques successifs aux grands
sanctuaires du Tibet-Central a certainement joué une part non négligeable
dans les développements de l'art classique tibétain.
Des études à venir ne manqueront pas de mettre ce point en
lumière.
Alors qu'un certain nombre de sculptures originaires de
cette région portent des inscriptions permettant de les attribuer
à un règne précis et donc de les dater, celle-ci en
est dépourvue. Toutefois, nous devons aux patients travaux sur le
sujet du Professeur L. Petech, de savoir que le roi Ripumalla fit une donation
de sculptures en argent. Compte tenu d'une convergence d'éléments
stylistiques et de la qualité d'exécution de cette oeuvre,
il est fort probable qu'elle ait pu faire partie de cet ensemble et
ainsi remonter au règne de ce roi, entre 1300 et 1320.
Pour une étude richement illustrée sur les Khasa-Malla
et présentant un Padmapâni en bronze doré probablement
issu du même atelier, Cf: Ian Alsop; 'Métal Sculpture
of the Khasa Mallas' in "Tibetan Art; Towards a definition of
style " 1997. |